
Gouvernance
Int�grit�, leadership, transparence et obligation de rendre compte –
Préliminaires aux thèmes du blog sur la gouvernance et le management public
Quelques mots sur la gouvernance ne relèvent certainement pas d’un exercice facile. Le concept, pluriel, comporte désormais un riche lexique, vulgarisé notamment par la littérature des organisations internationales, bien qu’il faille rechercher son origine aux confins de l’histoire et de la pensée philosophique et religieuse. L’on verrait alors, que selon l’encyclopédie Wiki peda, qu’il viendrait probablement du grecque (Kubernans), qui est passé au latin « gubernere », qui est devenu en français « gouverner » et dans la langue anglosaxonne, au 19e siècle « gouvernance ». Le terme rappellerait aussi les concepts de gouvernement, de gouvernail, laissant entrevoir ses relations de cause à effet avec le mode de gouvernement. Gouvernance qualitative, certainement, entrepreneuriale, nécessairement, pour nous africains… L’on pourrait aussi remonter à Platon (428 – 347 avant J.C) et à ses disciples qui parlaient d’une Cité juste, d’une certaine harmonie de la république, entre les classes sociales constituées par des gardiens de la sécurité, des dirigeants philosophes, par le groupe des paysans, des artisans et de commerçants. En somme, les gardiens de l’ordre, du savoir et de la création de richesse. D’autres philosophes et penseurs auront aussi depuis longtemps anticipé le mouvement actuel, Aristote, Avores, le jurisconsulte et philosophe musulman, Al Ghazali. Sûrement bien d’autres que nos amis les philosophes auraient bien intérêt à remettre au goût du jour, à l’heure du paradigme dominant de la gouvernance.
Gouverner, voire la gouvernance, pensait-on, en ces temps, serait mieux assuré si cela était le fait de dirigeants « philosophes, empreints de la sagesse et de la connaissance du bien qu’elle confère. Pour une cité juste, selon Platon, il faut que les philosophes gouvernent. Qui doit exercer ce pouvoir du sage ? Platon répond a contrario « pas aux ignorants, …, pas à ceux qui passent toute leur vie à se cultiver », et qu’au terme de ce processus, « restent trop étranger à la vie de la cité ». La connaissance, l’action aussi, la sagesse mais aussi la connaissance des réalités de la société, autant de critères importants. Or qui dit philosophe, parle de vision. Le mot est lâché, il n’y a pas de bonne et entrepreneuriale gouvernance, sans vision, sans leadership, naturellement sans le bon leadership, efficace, dévoué aux impacts, ce qui peut expliquer aussi par la suite que la stratégie, dont dit qu’elle était le fait des militaires, rejoigne la gouvernance.
Il n’y avait plus lieu d’attendre et il n’est guère étonnant que les Etats avisés, les entreprises, les organisations nationales ou internationales, publiques ou privées, gouvernementales ou non gouvernementales, eurent à adopter le credo, sinon le paradigme, de la pensée stratégique, premier socle de la planification stratégique : « penser stratégiquement, pour mieux anticiper, pour mieux agir, mieux atteindre, mieux apprécier et mieux ajuster ».
Si l’on revient aux temps actuels, on peut historiquement, reconstituer une certaine évolution, vers 1980, une époque où s’affirme le « New Public Management », avec une idée de base : « Moins d’Etat, mieux d’Etat », avec comme volonté d’accroître l’efficacité et l’efficience du service public. A l’époque, progressivement s’était instauré un mouvement expérimental, au niveau de certains Etats précurseurs, comme la Nouvelle-Zélande qui amorça un mouvement des réformes audacieuses ; en France, tout au début, avec Michel Rocard, alors Premier Ministre, avec sa stratégie de renouveau du service et des centres de responsabilité, en Grande Bretagne, avec Margaret Thatcher qui initie la nouvelle politique du « Next-Step », avec un réforme drastique de restructuration de l’Etat et la création d’agences orientées vers les résultats et l’obligation de rendre compte ; aux Etats-Unis, avec l’entrée en vigueur du « Gouvernement Performance and Results Act » qui induit la gestion des performances et des résultats dans le secteur public, l’obligation d’établir des plans stratégiques à moyen et long terme, des plans annuels de performance et des rapports annuels de performance, tous assortis d’indicateurs de performance ; au Canada où l’on reprend les modèle américain, au terme d’une étape antérieure caractérisée par la rationalisation des choix budgétaires (RCB), la Direction participative par les objectifs (DBO), la méthode des attentes signifiées et l’actuelle gestion axée sur les résultats (GAR). Ensuite émergent au cours des années 90 des paradigmes qui plaident pour un Etat régulateur. Une des leçons apprises par bien des managers et penseurs, c’est que la stratégie et l’action supposent la responsabilité et l’obligation de rendre compte, la restitution publique des résultats et de performances. L’Afrique en a-t-elle le courage ? Un vari débat, pourtant nécessaire pour tout commencer convenablement.
Par la suite, apparaissent de nouvelles classifications et typologies : gouvernance démocratique, gouvernance parlementaire, administrative, gouvernance de contrôle, judiciaire, économique, d’entreprise, gouvernance éthique, etc. Alors, à la lumière des leçons tirées des expérimentations, pour la mise en œuvre du concept, s’est affirmé une plaidoyer pour une gestion que l’on pourrait qualifier de « bonne », en tout cas prometteuse, une vision et une stratégie axées sur les résultats.
Les difficultés en Afrique à emprunter cette voie ne sont pas minces, car cela impose avant tout du leadership, de « payer de sa propre personne », mais aussi la question de la transparence. Quelque part, le credo est la capacité à Analyser, Agir, Arbitrer, Atteindre, Apprécier, Aiguillonner (6E). Une question sous-jacente est aussi le leadership qui pose la difficile question du comment : comment amener les gens à se focaliser sur une vision, à se l’approprier, à s’engager à la mettre en œuvre ? A se dire que tout est possible par eux, que rien n’est possible sans eux ?
La gouvernance, bonne ou entrepreneuriale, induit aussi une série de problématiques, celles de la légitimité, de la gestion et de l’ouverture équitable des opportunités économiques et sociale à tous ceux qui en ont le talent, de la volonté d’impulser un management par l’exemple, par les résultats et l’impact, pour satisfaire des besoins socio-économiques, de sorte que l’on puisse qualifier les institutions ou un gouvernement de « bon », d’équitable, d’efficace, de transparent.
Il n’y a pas de gouvernance qualitative et entrepreneuriale sans une orientation vers les résultats, l’impact, la qualité et l’éthique, sans vision stratégique, sans leadership éthique et mobilisateur des énergies latentes ou réelles, sans méritocratie, sans cette capacité à optimiser les talents, la productivité, à user de l’inventivité pour exploiter les opportunités et les niches pour la création de richesses intellectuelles et matérielles. Car, au cours de l’histoire humaine, tout commençait toujours par là, dans bien de cités émergentes, quant le savoir et ses détenteurs, les pouvoirs et gouvernants, les marchands et les créateurs de richesses acquéraient cette liberté de penser, d’agir, de créer, de faire des compromis, mais aussi quand se consolidait cette obligation de se conformer à des lois, des règlements et à des valeurs éthiques. Il n’y a pas de gouvernance qualitative et entrepreneuriale sans éthique, sans équité, sans discipline et respect des autres, sans transparence, sans responsabilité, sans obligation de rendre compte et sans la restitution des performances confiées. Alors prévaut un modèle de 5 E d’efficacité, d’efficience, d’économie, d’éthique, d’équité, alors qu’au début de l’ère du nouveau management publique, l’on parlait seulement des trois premiers.
Vaste programme ! Pourtant, pour l’Afrique, le concept peut être une opportunité, si seulement le continent sait impulser une stratégie volontariste, empreinte de fierté d’être, de savoir, de sagesse, pensée par elle-même et pour elle-même, mais ouverte et ajustée aux meilleurs paradigmes. Mais les écueils sont là, car la modernisation suppose aussi la modernité et peut-être, cela ne se décrète pas. De toute façon, c’est une question de survie, au-delà, de prospérité.
Plus de détail dans l’ouvrage de Abdou Karim Gueye « Le Cœur et l’Esprit »
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