
Audits
Bonnes et meilleures pratiques de l’audit dans le secteur public
Aux sources de l’approche de la vérification intégrée aux Etats-Unis. GAO – United States Government Accountability Office. Pour comprendre, regarder et écouter ces deux vidéos. A venir, un article de synthèse.
Une série de vidéos en ligne, sur le General Accountability Office, raconte une histoire intéressante d’innovation, celle d’un bousculement continu de paradigmes. C’est en 2004 que l’ancien General Accounting Office, crée en 1921, après la première guerre mondiale, sous l’empire de la loi dite Budget and Accounting Act, devenait le General Accountability Office. Cet organisme est dirigé par un Contrôleur général, recruté par le Congrès et par le Président des Etats Unis, qui ne peut être démis que selon la procédure d’impeachment ou par une résolution conjointe du Congrès.
http://www.youtube.com/watch?v=TTgP6_uQ-mQ
1 – La nécessité, s’il le faut, de changer de paradigmes et de s’adapter aux évolutions et enjeux
Ce changement de nom traduit bien les ambitions et les acquis d’une structure qui est passée progressivement, après la première guerre mondiale, d’une logique d’audit de la comptabilité à une logique de vérification intégrée. Un remarquable article de David M. Walker, ancien Contrôleur général des Etats Unis, en ligne sur le site du GAO, « GAO Answers the Question:What’s in a Name? » explique bien en détail ce mouvement. Les vidéos en ligne permettent de comprendre toute cette évolution et les résultats obtenus aujourd’hui, par le GAO. En fait, cette nouvelle et récente appellation traduit, depuis 1945, une nouvelle vision et un esprit constant d’innovation. Différents Contrôleurs généraux des Etats-Unis, Chefs du GAO, se rendirent compte que tout n’était pas dans les comptes, qu’il fallait penser autrement, au-delà des chiffres, comme l’exprime l’article précité et l’une des vidéos « More Than number[1] ». Ce processus n’est pas forcément compris dans sa globalité, en dehors des Etats Unis, car l’on tend à comparer le Gao avec d’autres organismes, sans commune mesure avec ce qu’est le GAO. Cette histoire racontée, c’est celle de la vérification, réinventée, en Amérique du Nord, par ce « Watchdog »[2], du Congrès.
En écoutant et regardant ces vidéos, on peut se demander si les termes d’audit et d’auditeurs siéent vraiment en la circonstance. Là encore, ce bureau innove, car on peut trouver dans son manuel, communément appelé GAGAS, un terme générique de l’auditeur défini en ces termes « Le terme “auditeur” dans le présent document comprend des individus qui effectuent un travail conformément au normes d’audit du Gouvernement (GAGAS), y compris des audits d’attestation et, par conséquent, les personnes qui peuvent avoir le titre de vérificateur, d’analyste, d’évaluateur, d’inspecteur ou d’autres titres semblables. Le terme «organisme de vérification» est utilisé, sous l’empire desdites normes, par référence aux organismes d’audit du gouvernement ainsi que les firmes comptables qui effectuent des audits en utilisant les normes du GAGAS[3]. »
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[1] Plus que des chiffres, voire Au-delà des chiffres
[2] Watchdog au sens littéral « Chien de garde », disons gendarme du Congrès
[3] 2The term “auditor” throughout this document includes individuals performing work under GAGAS (including audits and attestation engagements) and, therefore, individuals who may have the titles auditor, analyst, evaluator, inspector, or other similar titles. 3The term “audit organization” is used throughout the standards to refer to government audit organizations as well as public accounting firms that perform audits using GAGAS.
2. Des paradigmes réinventés à la formalisation de la vision, des objectifs et de l’action
On découvre, pour le bénéfice des américains, sous l’impulsion d’un Contrôleur général, Chef du GAO, l’organisation, les objectifs et les activités de l’organisme, formalisés par des normes professionnelles, des valeurs internes d’intégrité et par un processus interne de management stratégique, destinés à:
• améliorer les performances et les opérations gouvernementales ;
• évaluer l’efficacité et l’efficience des programmes, des politiques et des activités du gouvernement américain ;
• contrôler la manière dont les fonds sont dépensés, détecter la mauvaise gestion et les activités illégales,
• conseiller le Congrès et les dirigeants des services publics.
Il est intéressant de noter que les activités menées épousent quatre modalités de revue :
• la supervision à des fins de revue critique (oversight), notamment de la conformité aux lois, aux règlements et aux autres instructions, les modalités selon lesquelles les fonds sont dépensés, la sécurité contre les fraudes, les abus, les gaspillages et la mauvaise gestion ;
• la revue critique et dynamique (Insight) destinée à déterminer les bonnes pratiques, si les programmes et les opérations gouvernementales marchent bien, peu ou ne marchent, à déterminer et partager les meilleures et bonnes pratiques par un benchmarking permettant d’optimiser la gouvernance organisationnelle pour faciliter l’atteinte de résultats, améliorer les processus existants au sein des agences publiques;
• les revues d’identification, à des fins de prévoyance, voire de pronostic ou de prospective[1], des implications à long terme des décisions, des tendances clés et des défis émergents pour la nation américaine (Foresight), par exemple en matière de gap et de réformes fiscales, en ce qui concerne les nouvelles technologies, la sécurité aux frontières, la sécurité de l’information, la guerre en Irak, le programme pétrole contre nourriture, etc. ;
• l’arbitrage à l’occasion de la résolution de conflits dans le domaine des contrats.
Au terme de l’évolution historique qu’a connu le GAO, ses activités englobent essentiellement les audits de performance, des évaluations de programmes, des analyses de politiques publiques, des activités hors audit, de tels travaux constituant 90 % de ses activités, l’audit comptable totalisant entre 10 et 15 %.
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[1] Il faut remarquer que le manuel des normes d’audit gouvernemental (GAGAS) introduit une catégorie dite d’audit des analyses prospectives
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=U2GMf3PhoQU&hl=fr_FR&fs=1&]
3. Une emphase sur l’approche intégrée et étendue, au-delà des seuls chiffres
Bien que cela ne soit pas évoqué par les vidéos, il semble utile de souligner, par rapport à « l’oversight », une approche beaucoup plus dynamique que l’on retrouve dans le manuel des normes d’audit du gouvernement publié par le GAO et relative à ce qui alors appelé l’audit des analyses prospectives destiné à « fournir des analyses ou des conclusions relatives à des informations portant sur des événements qui peuvent se produire à l’avenir ainsi que les actions éventuelles que l’entité contrôlée peut prendre pour y répondre… Le manuel donne des exemples d’objectifs de vérification destinés à obtenir des conclusions fondées sur :
• les tendances actuelles et projetées, ainsi que l’impact potentiel sur les programmes et les services gouvernementaux;
• les programmes ou des politiques alternatives, y l’impact potentiel et futur sur les résultats des programmes ;
• les politiques ou des propositions de loi, y compris la perception des avantages, des inconvénients, par diverses parties prenantes intéressées;
• l’information prospective qui a été préparée par la direction;
• les budgets et les prévisions qui sont basés sur des hypothèses relatives à des événements futurs et la réaction de la direction par rapport à ces événements futurs;
• les hypothèses sur lesquelles les gestionnaires ont fondé l’information prospective.
4. Une approche des opérations d’évaluation fortement normalisée et formalisée
Le processus d’intervention et de travail repose sur cinq processus d’acceptation, de planification et de formulation, de collecte et d’analyse, d’obtention du produit et d’atteinte des résultats:
• L’acceptation de la mission, notamment des demandes du Congrès, sur la base d’un protocole en vigueur.
• La planification et la formulation, processus au cours duquel il est planifié le niveau de dotation suffisante pour accomplir la mission, en ressources humaines, avec des intervenants n’ayant aucun conflit d’intérêt, en évitant des doubles emplois avec d’autres plans d’audit, en identifiant les parties prenantes intéressées par la mission.
• La collecte de données et l’analyse, processus permettant de définir les moyens et les modalités de recueillir des données, de validation des preuves, de tirer des conclusions aptes à documenter les recommandations ;
• La finalisation ou développement du produit est le processus de mise en forme du rapport, dont la version provisoire est revue par un cadre supérieur, en ce qui concerne sa conformité aux normes et aux valeurs de travail du GAO. Ce processus conduit aussi à transmettre le rapport provisoire aux entités concernés et à toute partie intéressé pour solliciter des commentaires. Au terme de cette étape, le rapport final est publié, notamment sur le site web du GAO. Les vidéos précisent les mesures de sauvegarde, la publication pouvant être restreinte à divers éléments dits classifiés, soumis à restriction, considérées comme des données sensibles.
• L’obtention de résultats est déclinée à travers le suivi du rapport et de sa mise en œuvre, ce que le GAO appelle résultats.
FraudNet/Reporting Fraud
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=mWdo0Ca3fDc&hl=fr_FR&fs=1&]
5. Un impératif assumé, s’organiser pour atteindre la stratégie
La stratégie du General Accountability office tranche la vieille querelle de savoir si l’organisation précède la stratégie ou inversement. A cet égard, son plan stratégique consacre une vision cohérente, des outils et des démarches de gestion, conformes aux besoins du Congrès, du Gouvernement et des citoyens :
• des rapports en relation avec les grands défis de la nation américaine dont les recommandations sont sources de bénéfices, de valeur ajoutée et de retour sur investissement, par exemple sous forme d’économies et d’impacts;
• un management qui prêche par l’exemple du fait notamment que le GAO s’est défini la vocation de demeurer une organisation de classe internationale, axée sur la performance, les résultats, la responsabilité et au service de sa clientèle, le Congrès, le peuple américain et des parties prenantes;
• un management qui développe des partenariats pour le progrès ;
• des services destinés à appuyer le processus de transformation de l’exécutif, grâce à une gestion et un traitement efficients et pertinents, de qualité et à temps, des travaux et de l’information.
En outre, les processus de travail du GAO s’appuient sur un management formalisé de:
• détermination du niveau optimal ressources pour la réalisation de sa mission, compte tenu des défis budgétaires et de la demande croissante du public en résultats ;
• développement d’une culture qui élimine les inefficiences, les duplications de fonctions, met l’accent sur l’esprit d’équipe et le travail en équipe ;
• responsabilisation et d’amélioration de la transparence et de la prise de décision en son sein ;
• consolidation d’une véritable « machine de guerre » composée d’auditeurs et d’évaluateurs, puisés dans les viviers les plus divers de profils et de compétences, plus de 3100 personnes, répartis entre le siège, des unités régionales, un bureau à l’étranger, etc. ;
• structuration adaptée aux enjeux et aux opérations du GAO, avec des services en position de staff dédiés à l’amélioration continue des processus de travail, à la planification stratégique, aux relations extérieures, au développement organisationnel, professionnel et individuel ;
• motivation salariale et d’évaluations internes de la performance, plus globalement de management de la performance en s’astreignant à publier un rapport annuel sur ses propres performances et résultats ;
• management de la performance interne, en exploitant les acquis de la méthode du balanced scorecard[1] de Kaplan et Norton, pour mesurer ses résultats et le bénéfice que procure son travail, à travers les dimensions financiers et non financiers.
Illustration du balanced scorecard du GAO (Approche résumé)
Il est résumé ici les grands contours du système de mesure de la performance interne du GAO, le sujet étant beaucoup plus vaste ; c’est donc un premier sommaire qui est donné, en attendant de prochains articles plus détaillés sur ce site.
Axes du BSC[1]
Indicateurs Commentaires utiles
Résultats financiers et non financiers Pourcentage de produits comportant des recommandations
Recommandations mises en œuvre Pour chacun des axes, des cibles annuelles de performance sont définies dont il est rendu compte dans les rapports annuels sur les performances.
Client Nombre de témoignages effectués par le GAO
Délai de production à temps des rapports Un indicateur dont le GAO est fier, c’est celui du retour sur investissement sur chaque dollar qui lui a été affecté; sur 5 ans, il a été de 98 dollars pour chaque dollar dépensé pour le Gao, soit 48 milliards de dollars au total
Ressources humaines Taux de recrutement de nouveaux talents
Taux de rétention du personnel
Indicateurs de développement et le niveau d’utilisation du personnel Lorsque l’on parcourt le plan stratégique et d’autres documents du Gao, l’on est frappé par l’importance accorée à l’acquisition et le développement des ressources humaines et des compétences.
Processus internes la perception de la qualité du service et de son impact Le GAO effectue un sondage permettant l’évaluation…
Conclusion
Le GAO, c’est, beaucoup plus, un grand bureau d’études et d’évaluation, qui a su tirer profit, dans une synthèse remarquable, d’une vision systémique et intégrée. Cette approche est sans doute adaptée à la raison d’être du secteur public, à ses multiples et diverses ambitions, à ses spécificités, voire à ses multiples enjeux et défis, au service de clients et parties prenantes qui sont des citoyens, des usagers, des contribuables, etc.
J’espère que ce post et les vidéos en ligne vous permettront d’approfondir le sujet présenté en ligne.
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[1] Balanced Socrecard
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[1] Traduit par certains par la méthode du tableau de bord prospectif
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